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LES VOIX DU SILENCE : DIALOGUE ENTRE L'ART ET L'ARCHÉOLOGIE

Collaboration entre archéologie et art contemporain

Jocelyn Akwaba Matignon : Artiste Peintre
Sébastien Perrot Minnot : Docteur en archéologie
de l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.
Recherche :
Période : 2 mois de résidence artistique à San Antonio Aguas Calientes Sacatepéquez, Guatemala 2021_2022

Rappel du Concept : Il s’agissait d’une collaboration entre l’artiste de Guadeloupe Jocelyn Akwaba Matignon et l’archéologue, Sébastien Perrot-Minnot, spécialiste du monde maya,
autour d’une résidence artistique au Guatemala. Cette action visite à favoriser le dialogue et
l’enrichissement mutuel de l’Art et de l’Archéologie, dans l’approche, l’interprétation et la valorisation des œuvres de la civilisation maya.
Intervenants :
- Jocelyn Akwaba Matignon, artiste peintre
- Sébastien Perrot-Minnot, Consul honoraire du Guatemala en Martinique et Archéologue

Date

Avril 2023

Guadeloupe_Martinique_Guatemala

Guadeloupe : Arawak Beach Resort - Le Gosier – du 30 mars au 22 avril 2023
Martinique : La Guinguette - Saint Pierre – du 03 juin au 23 juin 2023
Guatemala : El Palacio de los Capitanes Générales _ Munag - Antigua - Août 2023

2021_2022

Novembre 2021 à août 2023

CONCLUSION D'UN ÉCHANGE ENTRE L'ARTISTE ET L'ARCHÉOLOGUE

Archéologue : Tout le monde ne peut pas être artiste. On pratique tous à un niveau ou à un autre de l’art mais pour certains artistes, sur un besoin d’une expertise qui a aussi des ressorts conscients et mystérieux. C’est une démarche chamanique, c’est la démarche d’un certain automatisme c’est la création d’œuvres qui dépassent l’individu et qui obéissent à des ressorts inconscients que parfois même l’artiste ne peut pas expliciter. C'est comme la religion, il y a du mystère.
En effet, l’artiste est dans une posture d’écoute et d’observation et puis les choses viennent on ne sait pas toujours pourquoi et comment. Et c’est pour cela qu’il est difficile de demander à un artiste d’expliquer son travail.
En même temps, il y a cet inconscient et en même temps une tradition. Il y a tout un produit de l’expérience, de la tradition, de certains héritages et le fruit du travail. L’Art avec un grand A, c’est un énorme travail. L’art c’est l’Esprit avec un grand E, ce n’est pas juste pour provoquer une émotion. L’Art s’adresse à quelque chose de subtile.
Mon idée de l’art se rapporte plus à celles des anciennes civilisations, qui faisaient appel aux strates les plus profondes de notre esprit, à l’âme.
Artiste : c’est doublement compréhensible parce que lorsqu’on est sur des sites Mayas et qu’on voit le travail qui a été effectué tant sur le plan formel que du mystère qui s’en dégage, on voit bien que c’est puissant.
Ce que je trouve d'intéressant entre l'archéologie et l'art, déjà ça commence par les deux mêmes lettres, c'est d'aller fouiller au-delà, parce que c'est vrai, lorsqu'on est devant une pièce on va la mesurer on va chercher à avoir des renseignements sur sa période etc… Mais en réalité, l'essentiel c'est dans le commentaire que tu y mets. On voit bien que la plupart du temps on ne sait pas grand-chose de l’œuvre, car la pierre n’est pas découverte avec un texte à côté qui précise sa fonctionnalité. C’est l’homme qui donne son interprétation. On doit fonctionner d’une certaine manière. On ne comprend pas toujours… Et puis sans savoir pourquoi une explication surgit. Et si ça servait à ça !!!! Et puis EUREKA
Archéologue : C’est pour cela que l’archéologie est une science éminemment humaine car l’interprétation est humaine.
Ce point est à souligner car beaucoup de gens ignorent ce que sont l’Art et l’archéologie ou en ont une idée très superficielle.
Artiste : De manière générale, l’art et l’archéologie vont bien ensemble. Il y a quelque chose de commun dans l’approche. Un mystère.
Archéologue : j’ai beaucoup réfléchi sur les origines mêmes de l’archéologie. Pour moi, l’archéologie en tant que science est née à partir du romantisme à la fin du 18ème, et dans les premières années du 19ème siècle. C’est très clairement, la littérature, la peinture montre bien que l’archéologie en tant que la science est née à partir du romantisme. Elle est essentiellement née en Europe il faut le dire dans un contexte où on a eu des révolutions, des guerres, des invasions. Des villes, des églises, des châteaux ont été ravagés, des royautés ont été abattus ce qui a du coup provoqué un choc par rapport à la rupture, à la fin d'un monde, à la fin d'un symbole ceux de la royauté ceux de la religion, ça a provoqué un choc et en retour, ça a provoqué une réaction qui est un autre point de vue et certains attachements affectifs par rapport aux vieilles pierres. C’est vraiment là que se situent les origines de l’archéologie d’où le fait que pour moi l’archéologie à des origines vraiment liées à l’art romantique.
Donc oui il y a une histoire, il y a même des origines qui lient l’art et l’archéologie.
Artiste : c’est cela qui est intéressant. Le fait de pouvoir avoir des regards croisés. Quand on est artiste, le plus souvent on travaille seul dans son atelier, dans ton canot, quand tu es archéologue tu es un peu tout seul également mais on pourrait dire pour imager, dans le canot si tu mets 4 artistes et dans un autre canot 4 archéologues, ce n'est pas pareil.
Ce qui est intéressant c’est de mixer les approches. D’avoir des points de vue différents et quand tu as ces points de vue différents tu peux élargir la possibilité de comprendre ce qui est en face de toi.

Jocelyn Akwaba-Matignon, artiste peintre, et Sébastien Perrot-Minnot, archéologue spécialisé dans le monde amérindien et Consul honoraire du Guatemala à Fort-de-France, se sont rencontrés pour la première fois en 2017, à la faveur d'une visite de la guide spirituelle maya guatémaltèque Francisca Salazar Guaran, dite « Nana Panchita », en Martinique. Depuis, ils se sont régulièrement retrouvés, et ont développé des échanges prolifiques sur les thèmes de l’art, des traditions amérindiennes et de l’archéologie précolombienne.

A la suite de leur collaboration dans le cadre de l’exposition de Jocelyn Akwaba-Matignon, « Les Seigneurs – Lords » (2020-2021), l’idée leur est lieu d’entreprendre un projet de dialogue entre l’Art et l’Archéologie, afin d’enrichir leurs réflexions et leurs pratiques respectives - suivant en cela une démarche qui a livré des résultats très intéressants, ces dernières années, dans diverses régions du monde.

Dans un article publié en 2016 dans Les nouvelles de l’archéologie, « Les archéologues sur le terrain de l’art contemporain », l’archéologue orientaliste Michaël Jasmin concluait : « Les interventions «  artistiques  » visent rarement à accroître la connaissance ou la compréhension des sociétés du passé mais elles interrogent très précisément sur notre relation au passé. Elles jouent aussi finement de la polysémie des sens et des usages de l’archéologie. Aux questions qu’elles présentent à la discipline, à ses méthodes, ses modes de visualisation, ses procédures ou ses pratiques de médiation, elles apportent des éléments de réponse intéressants et souvent justes ».

Jocelyn Akwaba-Matignon et Sébastien Perrot-Minnot ont ainsi décidé de croiser leurs regards et de mêler leurs approches dans un dialogue portant sur 20 œuvres préhispaniques du Guatemala, « Cœur du Monde Maya », un pays auquel ils sont tous deux très attachés. Les œuvres en question -dont le nombre fait référence à un puissant symbolisme numérique maya- ont été choisies pour leur pouvoir d’évocation, de fascination et d’interrogation. Elles ont été produites dans différentes régions : sur la côte Pacifique, dans les hautes terres et dans les basses terres (à Quirigua, Patrimoine Mondial). Certaines sont fameuses, tandis que d’autres sont inconnues du grand public. Le corpus comprend des sculptures très variées, mais aussi une structure architecturale.

L’artiste et l’archéologue ont abordé ces œuvres ensemble, lors d’un séjour au Guatemala, en 2021-2022, avec le soutien d’institutions publiques, de propriétaires de fincas renfermant des vestiges préhispaniques, et d’archéologues. Ils ont ensuite interprété les biens archéologiques, chacun de son point de vue et à sa manière, avec des mots et des formes, et ont noué de longues et passionnantes conversations sur leur sujet. Leurs réflexions ont intégré des contributions de la guide spirituelle Francisca Salazar Guaran, et le projet dans son ensemble a englobe de l’accompagnement et du précieux soutien de Sylvie Jean-Baptiste.

Les résultats de cette démarche ont dépassé les attentes des deux protagonistes, en ouvrant de nouveaux horizons à la créativité artistique, à la valorisation du patrimoine, mais aussi à la recherche archéologique, et finalement, à l’idée que nous pouvons nous faire de nous-mêmes, en tant qu’êtres humains.

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